Je fais de la pole dance. Oui, j’aime prendre la pose jambes ouvertes sur la barre. Si j’ai envie. Depuis que j’en fais – plus de sept ans, je vois un combat que je ne rejoindrai pas : se battre contre l’image “sexuelle” de la pole. L’ouvrir au grand public en privilégiant l’aspect gym ou plus largement non-exotic .
Tout ça me confronte à ma grande question depuis la nuit des temps : pourquoi avoir honte d’une connotation sexuelle ?
Attacher et être attachée, c’est quelque chose que je fais depuis mes… je dirais huit ans. Combien d’heures passées dans la salle de bains, en cachette, à tester différents types de liens et de zones du corps sur moi-même ? Combien de sensations dans les “jeux” que j’inventais avec mes amis ? Je me souviens aussi de la tête de ma première fois quand j’ai parlé de s’attacher avant. Et puis, j’ai finalement découvert le shibari dans une bibliothèque, avec un livre d’Araki.
Pareil, vouloir faire croire que le shibari, c’est un peu du yoga, c’est vouloir gommer, comme en pole dance, la honte de la sexualité. C’est le règne du porno chic au détriment du queer. Mais mettre en mouvement son corps et le connecter à d’autre personnes, public ou attacheureuses n’est jamais neutre! et l’énergie sexuelle jamais loin de l’énergie créatrice.
“Rendre accessible” une discipline en lui enlevant sa connotation, cela en dit long sur notre rapport au corps. Je ne peux plus accepter un mainstream édulcoré, où nous rejetons l’aspect le plus banal de la vie : la sexualité. Une ouverture au grand public oui, mais sans concessions.

Ce dont je rêverais, c’est une acceptation plus grande des pratiques alternatives, aussi sexuelles qu’elles soient. Même, déjà, du sexe tout court. Pas parce c’est forcément bon et qu’il faut que tout le monde s’y mette, mais parce qu’il faut arrêter, définitivement, de confiner cela à des zones sombres et inquiétantes.
En pole dance comme en cordes, il y a plusieurs demeures dans la grande maison. Et de même que je ne dirai pas que mes cordes suivent plus le droit chemin que celles d’un-e autre, de même je refuserai d’admirer une danseuse juste parce qu’elle transforme une discipline artistique en compétition.
Faudra-t-il se féliciter d’avoir transmis une image non-sexuelle de la pole ou du shibari au grand public ? Seulement si cette approche ne dénigre pas toutes les autres. Qu’elle ne soit pas vue comme un moyen de s’élever ou de sublimer. Simplement de faire quelque chose de différent.